1h 59m 40.2s pour Eliud Kipchoge
VIENNE – Journée historique pour la course à pied alors que Eliud Kipchoge devient le premier homme à courir la distance de 42,2km sous la barre des 2h!
Le prodige Eliud Kipchoge est devenu le premier homme à passer sous la barre mythique des deux heures au marathon samedi lors d’une course non officielle à Vienne taillée sur mesure pour permettre l’exploit.
Bien aidé par une armée de 41 « lièvres » tout de noir vêtus jusqu’à 500 m de l’arrivée, le champion olympique kényan, en short noir et maillot blanc, a bouclé son parcours en 1 h 59 min 40 s, soit quasiment 2 min de moins que son record du monde (2:01:39) établi dans des conditions homologuées à Berlin l’an dernier.
Dans la capitale autrichienne, le coureur de 34 ans s’est élancé à 8 h 15, heure locale, par une température fraîche, sur un circuit plat de 9,9 km à parcourir un peu plus de quatre fois, avec, au terme des 42,195 km, le fol espoir d’écrire l’histoire de l’athlétisme.
« Marquer l’histoire, c’était mon but. Je suis un homme heureux. Il n’y a pas de limites humaines », a confié au micro des organisateurs le détenteur du record du monde du marathon après son exploit, qu’il compare à « marcher sur la Lune » pour la première fois.
« Dès les premiers kilomètres, j’étais très à l’aise. Je me suis entraîné pour cela pendant quatre mois et demi, et j’avais gravé dans mon cœur et mon esprit que je courrais le marathon en moins de deux heures », a-t-il ajouté.
« Les records sont faits pour être battus, donc quelqu’un d’autre tentera de le faire, mais l’histoire a été écrite, c’est incroyable », l’a félicité son entraîneur Patrick Sang.
C’est dans l’ancienne réserve de chasse du Prater, dans le centre de Vienne, qu’a eu lieu l’expérience qui ne manque pas de susciter quelques critiques, certains estimant qu’il s’agit davantage d’un événement médiatique et commercial que d’un exploit sportif.
Le commanditaire de l’épreuve est le géant britannique de la pétrochimie Ineos dont le patron milliardaire, Jim Ratcliffe, a fait du sport son nouveau champ d’investissement.
À peine essoufflé par son exploit, Kipchoge a salué la mémoire d’un autre mythe de l’athlétisme: le Britannique Roger Bannister, premier athlète à courir le mile (1,60934 m) en moins de quatre minutes en 1954.
« Il a fallu 65 ans à un être humain pour entrer dans l’histoire du sport. Après que Roger Bannister fut entré dans l’histoire en 1954, il m’a fallu 63 ans pour essayer [une première fois en 2017] et je n’ai d’abord pas réussi ». Car en mai 2017, sur le circuit automobile de Monza (Italie), le Kényan avait manqué pour 25 secondes de passer sous les deux heures, lors d’un événement semblable organisé par des commanditaires.
« Cela fait maintenant 65 ans, j’ai essayé et je suis l’homme le plus heureux du monde d’avoir couru moins de deux heures pour inspirer beaucoup de gens, pour dire aux gens que l’être humain n’a pas de limites ».
Je m’attends à ce qu’il y ait plus d’athlètes dans le monde entier qui courent moins de deux heures après aujourd’hui.
Seules les caméras de l’organisateur étaient autorisées à filmer la course, qui s’est déroulée sous les yeux de nombreux spectateurs parmi lesquels Chris Froome, le quadruple vainqueur du Tour de France et leader de l’équipe cycliste Ineos.
Pour mettre son champion dans les meilleures conditions, le commanditaire n’a rien laissé au hasard : trois mois et demi de préparation du tracé, un parcours asphalté pour ne présenter aucune imperfection, une piste testée à maintes reprises notamment avec des logiciels de simulation, un jour et un horaire choisis en fonction de conditions météo favorables (température, taux d’humidité, qualité de l’air) et même la chute automnale des feuilles des arbres contrôlée de près.
En raison de ces conditions particulières, la performance ne sera pas homologuée par la Fédération internationale d’athlétisme.
Un peu d’aide
Pour gravir son Everest, Kipchoge a profité de l’aide de 41 « sherpas » de très haut niveau, comme l’ancienne légende du fond Bernard Lagat, deux des frères Ingebritgsen qui règnent sur le demi-fond et le fond européen, ou encore le champion olympique du 1500 m, Matthew Centrowitz.
Comme un président courant son jogging entouré de gardes du corps, le longiligne Kényan (1,67 m, 52 kg) a ainsi bénéficié d’un tempo régulier autour de 2:50 au kilomètre assuré par ces lièvres, qui se relayaient par groupes de sept autour de lui, tous les 5 km. Et une voiture de tête donnait le tempo devant eux.
C’était la deuxième fois que Kipchoge s’attaquait à la barre des deux heures dans des conditions de ce type.
Sur le circuit automobile de Monza, en Italie, en mai 2017, le Kényan avait manqué de 25 s la barre des deux heures, lors d’un événement semblable organisé par des commanditaires.
Le Kényan est l’un des plus grands coureurs de tous les temps, révélé au public lors de sa victoire sur 5000 m des mondiaux de Paris, en 2003. Vainqueur du marathon des Jeux olympiques de Rio, en 2016, Eliud Kipchoge est quasiment invaincu sur cette distance depuis 2013.
Cette fois, il disait vouloir « courir pour l’histoire ». Il y est définitivement entré ce samedi.
Source : Agence France-Presse