Apprivoiser la chaleur
Depuis quelques années, nos étés sont plus chauds, les grandes chaleurs plus fréquentes. À l’été 2020, nous avons vécu cinq périodes de canicule entre les mois de mai et d’août, du jamais vu au Québec. Il faudra apprendre à vivre avec cet effet du bouleversement climatique.
S’entrainer à la chaleur comporte son lot de pénibilités. Néanmoins, s’exposer et s’acclimater à la chaleur permet non seulement de mieux performer dans un environnement chaud, mais également d’en tirer profit pour le faire dans un environnement tempéré.
Une adaptation physiologique favorisée par la chaleur et avantageuse en milieu tempéré se caractérise par l’augmentation du volume sanguin. Cette adaptation en suscite une autre, celle d’accroître la production d’hémoglobine, protéine contenue dans les globules rouges, qui véhiculent l’oxygène dans le sang vers les muscles. Les conséquences de ces adaptations sont un débit sanguin accru passant par le cœur et l’acheminement de plus de sang contenant davantage d’oxygène vers les muscles actifs. S’entrainer à la chaleur peut devenir aussi profitable que de le faire en altitude, contraintes logistiques en moins.
Une autre adaptation physiologique provoquée par la chaleur est une économie de locomotion pour une vitesse donnée dans un environnement tempéré. Cet avantage s’explique par le fait qu’en réponse aux différentes exigences physiologiques imposées par le stress thermique, courir à la chaleur amène un accroissement de la consommation d’oxygène et de la dépense énergétique. Dès lors, en milieu tempéré et pour une même vitesse, le métabolisme s’adaptera en réduisant davantage la consommation d’oxygène et la dépense énergétique.
S’entrainer à la chaleur
Pour s’acclimater à la chaleur, il suffit de s’entrainer pendant plus d’une semaine à au-delà de 28°C – la durée dépend de la différence entre l’environnement habituel et les conditions thermiques auxquelles on veut s’acclimater. Il s’agit de courir à la chaleur pendant la journée et de réaliser les séances difficiles tôt le matin (avant 10 h) ou en fin de journée (après 18 h).
Ainsi, en journée, l’organisme étant soumis à un stress thermique élevé, on ralentira en vue d’atténuer la fatigue, l’objectif étant surtout de s’adapter à la chaleur et non de poursuivre l’amélioration des qualités aérobies. On se vêtira en conséquence, de façon à éviter de trop s’exposer aux rayons du soleil et de prévenir la surchauffe par radiation. On commencera par des séances de 30 à 40 minutes, en progressant de 10 minutes par séance pour atteindre 60 minutes, voire 90 minutes au maximum. Effectuer trois séances par semaine suffira à l’acclimatement. On maintiendra les acquis si on s’expose ne serait-ce qu’une seule fois par semaine.
Si la température fraîchit, il sera judicieux de continuer à courir chaudement vêtu, dans le but d’avoir chaud et de préserver les adaptations. Dans des conditions froides, on s’acclimatera à la chaleur en courant habillé de vêtements chauds.
Se préparer à une compétition
Il sera suffisant de s’entrainer à la chaleur trois semaines avant une compétition importante et d’éviter de trop s’y exposer dans la troisième semaine. Le délai sans exposition avant une compétition ne doit pas dépasser deux semaines, sinon les adaptations s’estompent.
Avant le départ d’une compétition dans un environnement chaud, il sera opportun de limiter la hausse de la température corporelle. Une option consiste à consommer dans les 30 dernières minutes une sloche (de 3 à 5 ml/kg de masse corporelle). On raccourcira la durée de l’échauffement en exécutant seulement quelques exercices éducatifs de course et quelques pointes de vitesse. Enfin, on cessera toute activité 10 minutes avant le départ, et on restera à l’ombre tout en continuant de se refroidir.
Profitez bien de la chaleur cet été. Mais attention : une canicule peut représenter un danger. Demeurez vigilant et stoppez l’entrainement lorsque vous ressentez des symptômes comme des frissons, un mal de tête, des nausées, des étourdissements ou une fatigue excessive. Hydratez-vous bien avant, un peu pendant et surtout après l’effort.
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Richard Chouinard est coauteur du livre Le guide d’entrainement et de nutrition publié par KMag.