Est-il vrai que les femmes battront un jour les hommes en course de fond ?

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Cette idée découle principalement d’une étude publiée en 1992 dans la prestigieuse revue scientifique Nature : « Will women soon outrun men ? » (Après tout, en natation de très longue distance, les nageuses surpassent souvent les nageurs!)

Les meilleures performances mondiales en course de fond s’étant améliorées plus rapidement chez les femmes que chez les hommes au fil des ans, les auteurs ont fait une simple extrapolation linéaire pour conclure qu’à partir de 1998, la meilleure performance mondiale féminine au marathon serait meilleure que celle des hommes. Suivant un raisonnement mathématique si naïf, on parviendrait un jour à courir plus vite sur marathon (où la progression au fil des décennies est globalement plus rapide) que sur 100 m (où la progression est plus lente).

Si les performances mondiales des femmes au marathon se sont améliorées plus rapidement que celles des hommes, c’est avant tout parce que les occasions d’entrainement et de compétition en course de fond des premières ont historiquement tardé à apparaître.

Les femmes semblent plus susceptibles d’être affectées de blessures de surutilisation à l’entrainement et de troubles gastro-intestinaux en compétition, cependant elles profitent d’un certain nombre de prédispositions physiologiques les favorisant en courses d’ultra-endurance:

  • un coût énergétique moins élevé (découlant surtout de leur plus faible poids) ;
  • une résistance à la fatigue un peu plus grande ;
  • un dosage de l’effort moins agressif en début de course.

Plusieurs évoquent aussi un métabolisme reposant davantage sur les lipides que les glucides. Mais en réalité, le taux d’utilisation des substrats énergétiques dépend bien davantage de ce que l’on mange et de l’intensité de l’effort que du sexe.

Bref, on n’a pas la certitude qu’un jour les femmes battront les hommes en course de fond, toutefois c’est dans les très longues épreuves que l’écart hommes-femmes est le moins important, alors que ce sont justement celles où l’on trouve pour l’instant le moins de femmes.

10 %

Ce qui explique le mieux les différences entre les sexes dans les performances au marathon est que la consommation maximale d’oxygène (VO2max) est, globalement, environ 10 % moins élevée chez les femmes. C’est ce que le professeur François Péronnet et moi-même avons montré à l’aide d’une analyse physiologique de l’évolution des performances de l’élite mondiale.

4 %

L’écart de performance entre les hommes et les femmes dans les compétitions d’ultra-endurance (4 %) est moins élevé qu’au marathon (9 %), et ce, malgré le nombre nettement plus faible de participantes.

 

Guy Thibault est docteur en physiologie de l’exercice et auteur du livre Entraînement cardio : sports d’endurance et performance.