JO de Tokyo – Portraits d’athlètes (2)

  • Crédit photo : Claus Andersen

Les JO de Tokyo a longtemps rimé avec peut-être que oui, peut-être que non ! Une chose est sûre, la brochette d’athlètes canadiens que nous présente notre collaborateur Laurent Godbout a des fourmis dans les jambes à la veille du début des JO 2020 !!!

JUSTYN KNIGHT

Crédit photo : Claus Andersen

Justyn Knight, qui aura 25 ans en juillet, est sans doute le plus méconnu des meilleurs coureurs de demi-fond canadiens. N’empêche que l’athlète originaire de la région de Toronto, en Ontario, a déjà été deux fois finaliste du 5000 m aux Championnats du monde en 2017 et 2019 et qu’il affiche un record personnel de 13 min 9,76 s réalisé au Diamond League de Rome en 2019. Le 28 février 2020, quelques jours avant la première vague de la pandémie, il démontrait encore une fois son grand potentiel en améliorant le record canadien en salle du 1500 m à 3 min 36,13 s. Un peu moins d’une année après ce record, nous avons fait connaissance avec un athlète optimiste et pas du tout démonté malgré une absence totale d’accès aux pistes.

KM. Commençons par la fin, si tu le veux bien. As-tu un plan B s’il n’y avait pas de Jeux olympiques ?

JK. (Rires) Pas de plan B. Je me concentre uniquement à être le meilleur athlète possible, un athlète qui se prépare à courir au plus haut niveau possible. J’ai un calendrier alternatif à condition que la COVID puisse être gérée de la bonne manière. Je suis un optimiste et je crois que les Jeux olympiques feront partie du calendrier.

Tu as joint le Reebok Boston Track Club, mais tu t’entraines en Virginie. Depuis combien de temps n’es-tu pas venu au Canada ?
J’ai passé les vacances de Noël au Canada et je suis ensuite revenu rejoindre le groupe ici, à Charlottesville, en Virginie. Avant la pandémie, tout allait très bien. J’étais tellement dans mes petites affaires que c’est par un ami que j’ai appris qu’il n’y avait pas de Jeux olympiques en 2020 ! J’ai été vraiment perturbé. J’ai vu deux options possibles, et j’ai choisi une vision positive en me disant que j’avais une année additionnelle pour me préparer. Cette année supplémentaire, je l’ai utilisée pour être plus fort.

Tu n’as donc pas toujours été en groupe ?

J’ai été relativement isolé de mars à octobre et je me suis efforcé de demeurer en santé. Quand je m’entraine par moi-même, je suis responsable de moi-même. Je ne ressentais pas le besoin de faire les courses. Depuis que j’ai rejoint mon groupe et mon entraineur, Chris Fox, je profite de la diversité de talents du groupe. D’un côté, je suis souvent devant le peloton lors des tempos, de l’autre, je me fais tirer dans certaines séances de vitesse. Nous avons deux gars à 2 h 9 min au marathon, et il y a également un autre Canadien, Ben Flanagan [NDLR : 28 min 6 s au 10 000 m], donc je suis bien entouré.

Des incidents extrêmement graves se sont produits à Charlottesville en août 2017, lors d’une manifestation de suprématistes blancs et néonazis de l’extrême droite. Comme homme noir, comment te sens-tu dans cette ville ?

Ça n’est pas toujours facile. J’ai eu de bons moments aux États-Unis, pendant ma carrière universitaire à Syracuse, dans l’État de New York, car je venais fréquemment en compétition à Charlottesville. Ce n’est pas le premier endroit où je suis mal à l’aise, mais je m’entraine ici avec mon groupe et ça va bien. À une seule occasion, lorsque je devais faire un entrainement à 6 heures du matin sur des chemins isolés, j’ai demandé à mon coach de me suivre en voiture. Je n’étais pas à l’aise à l’idée de courir seul dans la noirceur sur des chemins de campagne.

Parlons d’entrainement. Après une année complète sans compétition, quels sont tes repères ?

En février, j’ai fait de très bons entrainements avant ma première course, un 2 miles à New York [NDLR : Justyn a gagné cette course en 8 min 13,92 s]. Après un entrainement particulièrement bon où j’ai fait 3 x 200 m en 29-29-29 (30 s de repos intermédiaire), 2 x 1 mile en 4 min 6 s (1 min 45 s de repos intermédiaire) et 3 x 400 m en 58-56-56 (1 min de repos intermédiaire), j’ai eu une idée de ma forme. Quelques jours plus tard, lors d’une autre séance, j’ai refait 3 x 200 m en 30-29-28 (30 s de repos intermédiaire), 2 x 800 m en 1 min 56 s (1 min 45 s de repos intermédiaire) et 3 x 200 m en 26 s (30 s de repos intermédiaire). Après celle-là, mon coach m’a dit qu’il ne m’avait jamais vu faire un aussi bon entrainement.

C’est assez solide ! As-tu des objectifs précis ? un temps pour la saison ou un rang aux Jeux ?

À mes débuts professionnels, j’étais surtout intéressé par la réalisation de gros chronos. Maintenant, je sais que je dois être un gagnant. J’ai commencé à courir sans penser aux temps dans mes dernières courses, et ça m’a permis de développer une attitude de gagnant. Si on n’aspire pas à la victoire, c’est comme si on se plaçait en situation d’échec.

 

Laurent Godbout gravite autour des stades d’athlétisme depuis 43 ans. Il est analyste olympique à Radio-Canada et organisateur de la Classique d’athlétisme de Montréal.