La magie de Chicago

Il y a les grands marathons et il y a les grandissimes ! Le marathon de Chicago fait partie de cette deuxième catégorie.

Les raisons sont multiples : les bénévoles sont innombrables, l’organisation est impeccable, la foule dynamique, l’accueil unique, le parcours rapide et la ville inspirante. Coup de cœur pour la ville de vents.

Ce matin-là d’octobre, dame Nature collabore admirablement avec un mercure entre 15 et 18 degrés – la température parfaite, me dis-je en me rendant sur le site de départ. Il fait encore noir tandis que les coureurs s’agglutinent dans les zones d’attente. J’ai la chance d’être accueillie dans le secteur réservé à l’élite grâce à mes performances antérieures. Je côtoie, non sans me sentir imposteur, les grands du sport. Je me prends à parier sur l’un d’eux et l’une d’elles.

Sous la vaste tente chauffée, chacun a ses petites manies : étirements, exercices dynamiques, hydratation de toutes sortes de couleurs, barres et gels énergétiques, etc. Je sors m’échauffer autour du parc Butler Field. Le soleil se lève. Une cohorte de coureurs africains en survêtements amples passe devant moi. Le oush-oush de leurs vêtements imite une envolée d’oies. Ils sont aériens, ces Africains.

Quelques minutes plus tard, nous sommes escortés en tête du peloton des 40 000 coureurs sur les notes de l’hymne national américain et sous les cris de la foule. J’ai des frissons. La fébrilité augmente. La journée s’annonce mémorable.

Il s’agit de ma deuxième participation au Marathon de Chicago. En 2009, j’y avais réalisé mon tout premier chrono à vie sous les trois heures. Un grand moment gravé à jamais dans ma mémoire. Six ans plus tard, je m’élance à nouveau à l’assaut de cette belle ville.

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Chicago est la troisième ville des États-Unis, le pôle économique et culturel de l’Illinois en plus d’être le deuxième centre industriel du pays. Ce qui frappe d’abord le regard, c’est la diversité et la qualité de l’architecture, un « laboratoire d’idées novatrices ». C’est la faute au Grand Incendie de 1871 et à la tenue de l’Exposition universelle de 1893, la World’s Columbian Exposition, qui ont permis aux urbanistes de l’époque de reconstruire la ville selon des critères modernes et d’y ancrer un mouvement architectural unique. Plus récemment, en 2004, Richard M. Daley, alors maire de la ville, a inauguré le Millenium Park, un grand parc de 99 000 m2 pour transformer les friches ferroviaires de la Illinois Central Railroad. Après cinq ans de travaux colossaux, ce parc – plus important projet du genre depuis l’Exposition universelle – abrite la Cloud Gate (sculpture en inox en forme de haricot affectueusement nommée The Bean), la Crown Fountain (œuvre d’art urbain interactive et numérique) et le Pavillon Jay Pritzker (immense amphithéâtre en plein air). De quoi rendre jalouses bien des villes québécoises !

À ne pas manquer

Une balade sur la Chicago River à bord d’un des bateaux de la Chicago’s First Lady (compagnie officielle homologuée par la Chicago Architecture Foundation) permet d’en apprendre davantage sur l’architecture et l’histoire.

À mettre à l’agenda le lendemain du marathon !

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« Depuis quelques kilomètres, je sens mes réserves diminuer et ma foulée s’alourdir. Je peine à déployer l’énergie requise, il me semble que tout dégringole. » - Marianne Pelchat, rédactrice en chef de KMag

Les kilomètres défilent sous mes pieds. Mon rythme est bon, ma respiration régulière. Le parcours tracé en T couché se dirige d’abord au nord avant de virer à 180o et de redescendre vers le sud pour bifurquer à l’ouest, revenir sur lui-même, continuer vers le sud et remonter plein nord sur la Michigan Avenue et la Colombus Drive. Il s’agit d’un parcours plat et rapide, prisé par de très nombreux participants afin d’établir un record personnel. L’élite mondiale a cette même visée, des records du monde ayant déjà été enregistrés ici.

Les allers-retours sur de grandes avenues parallèles permettent aux spectateurs et aux accompagnateurs de suivre leurs coureurs favoris. La foule est dense et bruyante tout au long des 42,2 km. Mon amoureux réussit à me voir et à m’encourager cinq fois, dont à l’ultime moment, au km 40, quand mon corps et ma tête crient au secours. Depuis quelques kilomètres, je sens mes réserves diminuer et ma foulée s’alourdir. Je peine à déployer l’énergie requise, mais il me semble que tout dégringole. Je ne parviens plus à faire le décompte des kilomètres restants… ou est-ce des milles ?… mais c’est combien de mètres, déjà, un mille ?… Ouf ! Le calcul mathématique, pourtant si simple, est maintenant trop compliqué.

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La veille, nous pliant à nos habitudes pré-marathon, nous avons arpenté le dernier kilomètre ainsi que les lignes de départ et d’arrivée. J’adore cette marche introspective dans le silence que seuls quelques coups de marteau des préparatifs finaux viennent interrompre. C’est calme, à des années-lumière de l’effervescence qui régnera le lendemain. Je déambule d’un pas lent. Je prends mes repères. Je visualise les lieux. Clôtures, tentes, tables, tout est prêt. Moi aussi, me dis-je.

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Chéri apparaît une dernière fois quelque part après le 25e mille pour me motiver et me fournir l’ultime encouragement nécessaire. Il court à mes côtés quelques mètres et me dit d’une voix rassurante : « T’es en masse dedans, t’es en masse dedans. » Étonnée par son affirmation, je reprends conscience, réalisant que je suis tout près. Je fonce vers la ligne d’arrivée, non sans serrer les dents en montant la seule p’tite bosse du parcours sur Roosevelt Road. J’arrête le chrono à 2 h 54. Record personnel ! Hourra !

Les bénévoles, la foule dans les estrades, l’animateur sur la scène, les médias, tout flashe et sonne de partout. L’endroit si tranquille la veille est maintenant un grand cirque effréné, et tout ça participe à la magie !

World Marathon Majors

C’est le grand chelem des marathons, un regroupement des six plus grands marathons du monde – Berlin, Boston, Chicago, Londres, New York et Tokyo – auxquels s’ajoutent, les années où se déroulent ces compétitions, le marathon des Championnats du monde d’athlétisme et celui des Jeux olympiques. Le gagnant de ce classement est déterminé par des points attribués lors de chaque course en fonction de la place obtenue. Le marathon de Chicago est également reconnu comme une course de niveau Or de l’IAAF.

 

Des chiffres qui parlent

40 000 chanceux sur les 70 000 candidatures reçues ont obtenu leur dossard.

De ce nombre, 37 182 ont franchi le fil d’arrivée sur Colombus Drive.

2 h 9 min 25 s             Temps du vainqueur, Dickson Chumba, en 2015

2 h 23 min 33 s            Temps de la gagnante, Florence Kiplagat, en 2015

4 h 33 min 15 s           Temps moyen en 2015

40                                Nombre de bougies que soufflera le Marathon de Chicago en 2017.

4200                           Nombre de coureurs lors de la première édition. À l’époque, il s’agissait de la plus importante participation à un marathon.

10                               En dollars, le coût de l’inscription aux débuts du marathon de Chicago. En 2015, il était de 210 $.

12 000                         Nombre de bénévoles.

1500                            Nombre de préposés aux premiers soins.

400                              Nombre de massothérapeutes.

1,7                               En million, nombre de spectateurs le long du parcours.

1,3                               En million, nombre de verres d’eau distribués.

48 000                         Nombre de gallons de Gatorade.

75 000                         Nombre de bananes.

47 000                         Nombre de sacs de bretzels.

1500                            Nombre de toilettes bleues.

200 000                       Nombre d’épingles à dossard.

108                              Nombre de pays représentés.

100 000                       En dollars US, bourse au premier homme et à la première femme.

753 000                      En dollars US, total des bourses remises aux vainqueurs des différentes catégories.